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22 février 2012 3 22 /02 /février /2012 18:13

audience du mardi 21 février 2012 :  Savez vous parler le Desmarest Crédible et Consistant ?

 

 

Pour parler le Desmarest, il faut parler peu, dont beaucoup pour ne rien dire, avec des mots sélectionnés pour leur apparence crédible et consistante.

 

De quoi se compose le parler Desmarest ? un petit silence glissé entre chaque mot, parfois couvert d’un modeste euhhh, chaque mot appartenant à un même territoire du lexique bien circonscrit, un débit lent quoique pas trop non plus, une syntaxe prolixe en subordonnées relatives et circonlocutions superfétatoires, en préambules, un ton soporifique et monocorde pour engélatiner tout ça, et vous êtes déjà bien partis pour parler ou entendre parler le Desmarest !

 

Qu’on ne s’y trompe pas, ce n’est pas parce que le lexique est réduit à deux cents mots, même s’il sont répétés cinq ou dix fois, que pour autant le langage est factuel ou approximatif, la syntaxe rudimentaire et les idées frustes ! Nous ne sommes pas dans les Mangas, ni dans le pidgin des bandes dessinées coloniales ! bien au contraire, les mots utilisés sont soigneusement choisis et semblent disposer, hasard sans doute, d’un risque juridique voisin de zéro. Le débit est sédatif et les mots sont là pour donner à l’auditeur l’illusion qu’il entend quelque chose. Comme un genre de phrase par exemple. Et à la fin, on aurait l’impression d’avoir entendu des déclarations.

 

Thierry Desmarest parle une langue, certes de bois, mais du bois expansé neutre dont on fait les ectoplasmes. Une sorte de bois extra-léger, sans matière, sans ambition, sans arrière-pensées, sans goût et sans couleur. Une voix, une expression qui serait tout le contraire d’une explosion de nitrates.

 

Si l’on a bien compris la journée du 21 février, M. Desmarest n’a pas choisi les membres de la commission d’Enquête Interne, c’est d’ailleurs à peine s’il connaît leur nom. Il n’était quasiment pas destinataire de leur rapport. « On » lui en a fait de succincts compte-rendus. Sa charge de PDG d’un grand groupe comme Total lui prenait beaucoup de temps et il ne pouvait s’intéresser à tout ce qui se passait ici ou là dans le groupe. La CEI, c’était 3 niveaux hiérarchiques inférieurs à lui ! Ce qui ne l’empêchait pas de demander autour de lui parfois si on avait trouvé une explication « crédible » (qu’il pouvait croire… ) ou « consistante » (ferme parce que pleine de matière) .

 

Mais le parler Desmarest, c’est aussi un certain sens du slalom. Il a exprimé l’engagement du groupe dans la recherche de la vérité dès le 21 septembre 2001, mais n’est pas lui-même concerné par cet engagement puisqu’il ne lit pas les rapports de la CEI. Il est auditionné par la commission parlementaire le 6 décembre 2001, et n’évoque ce jour-là que de deux pistes dont il a entendu parler à Toulouse en venant visiter le site le jour de l’explosion : la piste électrique et la piste de deux explosions. Deux choses sont étonnantes : le 6 décembre, les parlementaires ne lui demandaient pas d’évoquer de pistes, et il en donne deux malgré tout. Et plus étonnant encore, la veille, le 5 décembre la CEI avait produit un rapport qui privilégiait la piste….de l’accident chimique. Pas crédible et pas consistant, vraisemblablement.

 

De même devant les parlementaires le 6 décembre 2001, M. Desmarest insiste sur le retour d’expérience, un gagnant-gagnant très utile aux industriels et à tout le personnel, avait-il affirmé aux élus du peuple. Quand on lui a demandé le 7 février 2012 quels étaient les leçons tirées de ce retour d’expérience, M. Desmarest avait lâché, après une cahotique et sinueuse circonlocution partie loin dans sa mémoire pour retrouver une recommandation, « fractionner les tas, quand c’est possible ». Et cela n’a pas été plus consistant.

 

Chacun aura noté la pertinence hardie et pointue de cette recommandation ! Mais on a bien compris que comme la CEI a abouti à un échec, puisqu’elle n’avait pas trouvé de piste « crédible », il n’était pas possible de faire plus « consistant »

 

En réponse à une question de Me Forget, avocat de Mémoire et Solidarité sur le lien entre fermeture de l’usine et non-découverte de la vérité par la CEI ou la police, M. Desmarest a parlé franchement (pour marquer la différence avec ce qui venait d’être dit sans doute) pour dire que le site aurait fermé très probablement à cause du traumatisme causé par l’explosion. Il n’a pas été précisé si c’était le traumatisme des riverains ou des salariés.

 

Le 21 février, le parler Desmarest nous a aussi répété « qu’il n’aurait apporté aucune valeur ajoutée par sa présence dans la CEI », renchérissant par « La CEI était composé de gens compétents, même si je ne les connaissais pas ».  

 

Le 21 février, M. Desmarest nous a fait son numéro de membre de la confrérie des abonnés absents en 3 temps.

Il était au courant du bout des lèvres que la CEI n’avait pas de piste crédible et consistante,

Pour les détails, son emploi du temps de PDG ne lui permettait pas de s’en occuper.

Pour le reste, il ne se souvient pas.

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